Fin octobre, j’arpente les rues de Bordeaux centre munie d’un appareil photo ce qui interroge les passants. Il faut dire que je n’ai pas le look d’une touriste. Et je photographie ce qu’on ne voit même pas ou même plus.
C’est assez troublant ça. Il ne suffit pas de rendre quelque chose visible, de l’offrir aux regards pour que les gens le perçoivent. Il faut souvent qu’un autre leur montre, ou porte suffisamment son intérêt en ce lieu pour susciter la curiosité du badaud.
Et chacun à son style.
Je photographie un pochoir et un cycliste intéressé s’arrête :
« vous êtes dans l’immobilier? »
« ah non, pas du tout! Je prends les graffitis »
« ah bon, ah …. oui? »
Et ce Monsieur repart perplexe.
Ou encore, Place de la Victoire, cette dame qui s’immobilise au niveau de l’œuvre de Tiravy et qui se parle à elle-même :
« ah ben j’avais pas vu que c’était là ! » tout en poursuivant sa route.
L’œil de l’appareil photo rivé sur ce collage a arrêté un instant la course de cette femme.
Je ne sais pas comment vous, vous marchez dans la rue. Mais moi, je suis contrainte de constater que je ne regarde ni les gens ni les murs. J’avance branchée sur mon objectif, le lieu à atteindre et accaparée par mes pensées. Et dans ce contexte il faut qu’il se passe quelque chose pour me stopper, faire coupure dans mon élan.
A moins qu’une couleur, une forme ou une étrangeté attire mon regard. Et c’est là que se loge le street art. Il surprend, interroge et parfois fais réfléchir.
Alors maintenant j’ouvre l’œil !